mercredi 26 janvier 2011

Les lettres du secret


"Les lettres du secret" de Bae YOO-AN nous raconte l'histoire d'un jeune garçon coréen, Jang-un, issu d'une famille très pauvre. Sa mère est morte, son père invalide d'une de ses mains, ne pouvant plus exercer son emploi de tailleur de pierre et sa grande sœur Deok, vendue comme domestique dans une grande famille pour payer un peu les dettes, il doit surmonter sa condition, d'enfant, de pauvre, et se trouver une voie dans la vie.
Une rencontre avec un gentilhomme, en haut de la montagne, va être le début de la chance. En échange d'eau pure pour les yeux du vieil homme, ce dernier lui offre du riz (denrée rare), puis des cours d'écriture et de lecture en se servant d'un nouvel alphabet.

Jang-un, très courageux et laborieux, va s'échiner à faire survivre la maisonnée tout en accentuant ses passions: cette nouvelle écriture et la taille de pierre.
La nouvelle écriture est d'abord un langage quasi secret. Jang-un s'en sert pour communiquer avec sa sœur. Cette connaissance est un privilège gardé pour les proches, les amis, gardée aussi pour se prémunir des lettrés malhonnêtes utilisant l'analphabétisation de la population pour leurs intérêts. Puis Jang-un va au fil des mois intéresser plus d'un avec ces symboles tracés sur la terre.
La taille de pierre apparait aussi là, comme transmission du père, comme incarnation du jeune homme dans ce qui l'entoure. C'est aussi un apprentissage à la tâche, au labeur, une formation technique sur la matière mais aussi une formation de l'esprit. Dans chaque pierre le sujet est là en puissance, prêt à se mettre à vibrer, à frémir, à vivre bien avant que le sculpteur ne le mette à jour.

Ce livre est un roman pour les enfants à partir de 9 ans mais il offre un contenu riche sous une écriture très fluide. Il nous replonge dans une Corée traditionnelle où le labeur quotidien est obligatoire pour les plus modestes : les menus travaux du quotidien mais aussi les tâches pour gagner un peu d'argent. Et nous sommes à leur table et à leur chevet aussi (avec présentation de la nourriture et des soins traditionnels). En ce sens, le livre apporte aussi un contenu plus dense.
Mais encore plus, c'est ce parti-pris qu'est l'alphabétisation d'un peuple comme enjeu politique qui domine le récit. Soit le passage des idéogrammes chinois, exclusivement réservés aux lettrés (parce qu'il fallait le temps de les maîtriser) à l'alphabet coréen, le hangeul (hangul), accessible au plus grand nombre. Historiquement c'est Sejong le grand, roi coréen du 15ième, qui a inventé et imposé cette écriture. La valeur de l'écrit prend alors tout son sens: celui d'une transmission des savoirs, d'une communications des faits et des sentiments, d'une puissance de tout un chacun.

Vous trouverez un avis pertinent . En attendant de prendre une pierre et d'avoir envie d'y tailler un crapaud sur la tête duquel j'écrirais chance!

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