vendredi 20 avril 2012

Zagazou

"Zagazou" de Quentin BLAKE est le dernier coup de cœur du lutin de 5 ans 1/2! Et c'est vrai que ce petit livre est un condensé d'humour.

© Quentin BLAKE / Gallimard jeunesse

Ils s'appellent Georges et Bella, ils sont heureux et un jour, par la poste, Zagazou arrive. Zagazou est la petite créature toute rose, toute mignonne.
Ils se la lancent et adorent ça. Il a quelques désagréments mais bon, il est tellement mignon...

© Quentin BLAKE / Gallimard jeunesse

mais un jour il se transforme en un énorme bébé vautour... Comment vont-ils supporter ses cris? Et juste au moment où ils n'en peuvent plus...
"MAIS ALORS..."
Mais alors, une autre transformation a lieu. A chaque étape, un nouvel animal, une autre créature avec des comportements déraisonnés, impossibles à supporter longtemps.... jusqu'à la prochaine fois...

© Quentin BLAKE / Gallimard jeunesse

Le fils passe d'un développement à l'autre parce qu'il s'agit bien du comportement de l'enfant jusqu'à l'âge adulte en métaphore. Enfin, il s'agit de différence de générations, les comportements vus de l'extérieur.
Le "Mais alors" ponctue les pages, donne le ton et le rythme, c'est court mais bien servi. Les illustrations de Quentin BLAKE sont toujours bien campées. Elles apportent cette causticité des comportements, autant "ceux animaux" que la perplexité parentale.
Un peu de parentalité et de filiation.

Cassandre

"Cassandre" de Rascal et illustré par Claude K.DUBOIS est une petit livre plein de poésie. Mais c'est vrai que je n'en attendais pas moins de ce duo: tout en sensibilité.

© Rascal et Claude K.DUBOIS/ Les 400 coups

Cassandre est la meilleure amie de Marie-Paule. Elle est très jolie, la plus gâtée par le Père Noël. Mais elle n'est jamais satisfaite.
Sur les bords de mer, Marie-Paule monologue. Elle parle de son prénom, de l'affection familiale, de la transmission et aussi de ces cadeaux chargés de sens.
L'enfant est seule, avec son poupon Martin, quelques fois le chien. Elle réfléchit. A Cassandre bien-sûr, elle (nous) parle de leur échange de poupées pour un week-end: une "pipi-caca" qui ne sait dire que "papa", "maman", faire pipi et possède toute une panoplie d'habits, contre Martin, aux habits faits maison mais aussi aux conversations infinies.
Marie-Paule parle de son amitié, de celle portée à Martin, de celle portée à Cassandre.

© Rascal et Claude K.DUBOIS/ Les 400 coups

Toutes les pages entourent le sentiment d'amitié. Une amitié enfantine mais vraie. De celle qui remplit d'affection, de tendresse, de dévouement, de don.
Il est aussi question du sens des cadeaux, des échanges, des transmissions familiales.

© Rascal et Claude K.DUBOIS/ Les 400 coups

Sur fond de marrée basse, l'enfant déambule dans l'estuaire et les illustrations de Claude K.DUBOIS nous montre sa solitude, mais pas la morose, l'assumée peut-être même souhaitée... la nature, les laisses de mer, les châteaux de sable ont autant de valeur que sa chambre.
Les crayonnés aquarellés sont ici plus flous, moins précis que dans certains livres de cette illustratrice. Les émotions ne viennent pas forcément des expressions du visage mais plus du vent, de la distance, de l'humidité avec du grain, comme du sable.

mardi 17 avril 2012

60 expériences faciles et amusantes

Et voilà une nouveauté toute faite pour me plaire : parce que oui, si vous n'avez pas encore investi dans les livres d'expériences scientifiques de Croq'sciences dont je vous parlais là, ce livre est fait pour vous.

En effet, "60 expériences faciles et amusantes" de Delphine GRINBERG reprend le meilleur de plusieurs thèmes abordés et ainsi diminue les frais, bien-sûr (et pour beaucoup: plus de 10 euros chaque thème et celui-ci en reprenant beaucoup à 10 euros). Le point faible est que si vous avez les livres sur les thèmes concernés, celui-ci n'est qu'un doublon!
Vous retrouverez donc certaines expériences des livres sur les animaux, l'eau, la chimie, les sens, le goût, l'action de rouler et les ombres avec les superbes illustrations de chaque dessinateur associé.

© Delphine GRINBERG et Cie/ Nathan

Je parle de certains d'entre eux .
Le livre semble aussi apporter une plus-value dans son sommaire, permettant de choisir avec beaucoup plus de critères. Il perd tout de même les fenêtres à ouvrir qui amusaient les plus jeunes et aussi les objets joints permettant la pratique directe d'une des activités. Ce livre-là est foncièrement tourné vers la pratique.
Vous aurez aussi une idée plus complète .

vendredi 13 avril 2012

Pas de ciel sans oiseaux

Alors comment dire? Cet exemplaire était dans la vitrine, le seul exemplaire de la librairie jeunesse. Comment dire, je ne l'ai même pas feuilleté... et pourtant cela devient une de mes priorités pour ne plus trop accumuler les livres, pour ne choisir que des coups de cœur, je vais même jusqu'à lire l'album jeunesse entier dans les rayonnages.

© Rémi COURGEON / Mango jeunesse

Je l'ai sorti de sa présentation de verre et l'ai payé en espérant... et voilà, j'ai reçu... : par son "Pas de ciel sans oiseaux", Rémi COURGEON m'atteint encore une fois...

Il s'agit de bricolage, mieux de mécanique. Augustin est un vieil homme extrêmement serviable, se rendant disponible pour tous les bricolages de son village. Il aime faire plaisir. Il répare tout, en artisan, en artiste.
Victor, un enfant, frappe à sa porte et lui présente la dépouille d'un oiseau en lui demandant de le réparer... Réparer un service de cristal avant un mariage, oui, mais là, réparer un rouge-gorge:
"- Quand Victor reviendra, je lui expliquerai que tout ne se répare pas, que la vie s'arrête et tout ça..."
© Rémi COURGEON / Mango jeunesse

Et pourtant, Augustin se prend au jeu et le cœur de l'oiseau se remet à battre. Rêve ? Réalité ? Qu'importe...
Le lendemain, le ciel est silencieux, pas d'oiseau, plus d'oiseau. Depuis quand? Augustin se remémore les oiseaux d'hier et se met au travail. A chaque nouvel emplumé, il grave ses initiales sur l'une des pattes. Il est maintenant trop occupé pour se livrer à d'autres réparations... il créée des oiseaux. Après 5 ans, Augustin et Victor se retrouvent, l'enfant n'a rien oublié, le vieillard lui montre son secret. Et les voilà tous les deux repeuplant le ciel de ces oiseaux disparus.

© Rémi COURGEON / Mango jeunesse

Il y a de la magie dans ce livre. D'une part, bien-sûr dans le propos avec ces créateurs de vie, parce que les oiseaux ne sont pas mécaniques mais bien de chair, de sang et de plumes, tout à fait comestibles pour un chat. D'autre part, parce qu'entre les lignes, il est question de cette nature autour de nous... ce ciel avec ces oiseaux, cette mer avec ces poissons etc...
Bien-sûr, aussi, il est question du cycle de la vie...

dimanche 8 avril 2012

Le nez dans les livres

J'aime beaucoup, beaucoup, le travail de Kitty CROWTHER. Vous le savez?! Je me retiens de ne pas vous parler de tous ses livres (mais je ne me ferais pas prier trop longtemps non plus)... Cette auteure/illustratrice belge n'est pas la seule à offrir de sa personne, à me parler à travers ses livres, à toucher un point extrasensible chez moi.
Un jour j'en parlerais peut-être encore plus, dans les détails, au point de me dévoiler encore. Mais d'un autre côté, entre les lignes de mes lectures, il y a toujours du subjectif. J'attends peut-être aussi du côté de chez Mirontaine...

Je suis ravie, par exemple, que Mélanie RUTTEN ai de plus en plus de succès au point que mes libraires préférées n'est pas réussi à en garder un exemplaire assez longtemps (quelques jours) pour que j'arrive le récupérer...

Mais, au hasard de nos lectures du soir, le travail de Gerda DENDOOVEN revient... sa vision de la mère m'a le plus émue... et ses illustrations me touchent dans un autre angle. J'attends avec impatience que ses autres livres sortent en français, en espérant que d'autres éditeurs, après feu les éditions Être que j'aimais tant, nous en offrent les traductions.

Et quel plaisir de découvrir que ces deux Melles, CROWTHER et DENDOOVEN, partagent leur enthousiasme, leur admiration, dans une illustration commune: une plaquette de timbres d'une Belgique réunifiée, de 2010!

*source Acamédie royale des Beaux-Arts de Bruxelles

"L’armoire occupe une place centrale. Elle dégage quelque chose de très intime et de très mystérieux. C’est une cachette idéale pour lire un livre, par exemple."
Kitty CROWTHER (extrait trouvé ici)

jeudi 5 avril 2012

Charles à l'école des dragons

"Charles à l'école des dragons" d'Alex COUSSEAU et illustré par Philippe-Henri TURIN a mis du temps pour arriver à la maison. Le format sûrement: superbe, immense, mais difficilement intégrable dans une bibliothèque. Et voilà: j'ai laissé le seul inconvénient cacher les merveilleuses propositions. Alors ne faites pas comme moi, ne vous en préoccupez pas. Ce livre est fabuleux!

© Alex COUSSEAU et Philippe-Henri TURIN/ Seuil jeunesse

Charles est un dragonnet qui vient de naître... il est magnifique, fait la fierté de ses parents et grandit bien. C'est le temps de l'école, sa maîtresse va lui apprendre à cracher du feu et à voler.

Mais voilà, Charles n'est pas n'importe quel dragonnet, il est poète et ne sait pas se comporter comme un dragon: les cahiers, qui servent normalement à exercer le souffle, le feu par éruption vocale, sont pour lui le support déversoir de son esprit. Parce que oui, il écrit de la poésie, et il écrit beaucoup.
Et puis il est un peu encombrant: grand pieds pouates, immenses ailes, bizarre dans son coin immobile courbé sur ses cahiers. Avec ces extrémités, il tombe de l'arbre sans pouvoir s'élancer, il se prend dans ses ailes, marchent sur les pieds...

© Alex COUSSEAU et Philippe-Henri TURIN/ Seuil jeunesse

Comment faire pour devenir un dragon en ne sachant qu'écrire? Avec un coup de pouce de la vie, une amitié particulière peut-être...

La différence, les défis de vie sont présentés mais ce livre est magnifique plutôt sur la philosophie de vie.
Charles est poète, un poète pessimiste, allergique à la beauté conventionnelle de la nature accueillante et colorée du printemps. Charles est né le même jour que son double réel, le poète Charles BAUDELAIRE. Le spleen est bien là, la vie misérable aussi,... jusqu'à ce qu'elle apporte un renouveau, une place pour Charles sans pour autant le changer.

© Alex COUSSEAU et Philippe-Henri TURIN/ Seuil jeunesse

Les illustrations de Philippe-Henri TURIN sont grandioses. Elles fourmillent de détails dragonnesques. Les couleurs ne limitent pas ce sentiment de solitude, de dégout, de spleen. Les paysages magnifiques marquent une apposition bienvenue entre les émotions de Charles et le réel.

C'est Gaëlle qui m'a confirmé que je devais absolument le lire.

mardi 3 avril 2012

Noir grand

"Noir grand" de Sébastien JOANNIEZ et illustré par Daniela TIENI est un tout petit roman. Petit oui mais un condensé poétique sur l'intolérance et ce qui se cache derrière.

© Sébastien JOANNIEZ et Daniela TIENI/ Rouergue

Le narrateur est un enfant noir, ses parents sont blancs. Bien-sûr il y a une adoption là-dessous. Au départ, les parents sont les plus heureux du monde, ils klaxonnent en revenant au petit village avec lui dans les bras. Au départ, les villageois sont ravis aussi... puis le petit noir grandit, il devient "Noir grand" et le regard des autres change, seuls ses parents restent aussi enthousiastes.

Le Noir grand a pourtant grandit là, dans ce village, il a pris les expressions, le patois, les manières de vivre. Il s'est adapté mais intégré... non. La sympathie pour un poupon a laissé la place à un racisme confus, puéril puis acerbe:
" Tout le monde m'appelait Chocolat. Et je les appelais Vanille. Alors ils m'appelaient Tête de Nègre et je les appelais Faces de Fromages. Alors ils m'appelaient Tais-Toi et je les appelais Pourquoi."
L'enfant s'isole, se terre, se recroqueville dans le noir, ne veut plus suivre l'école, ne veut plus du soutien de ses parents.
L'enfant va reprendre pied, grâce à la gentillesse, la nature et le mouvement, la diversité de la vie.
Le racisme primaire pris à la source se fait méconnaissance, se délie un peu par les réflexions sur l'adoption, sur les trames de vie, de couple, de parentalité et devient un tableau plein de tâches de couleurs odorantes.

© Sébastien JOANNIEZ et Daniela TIENI/ Rouergue

Ce livre parle d'adoption, un peu, de racisme, beaucoup. Mais il parle surtout de cette attente d'un enfant, de ce rapport entre le parent et l'enfant. Le sien marqué de notre amour, le leur marqué de nos angoisses.

La poésie est là, à chaque page. Par cette fraicheur du propos: un garçon qui découvre l'intolérance, les actes amenant le changement mais aussi dans le style, ce jeu des couleurs, cette vision intérieure et extérieure.

© Sébastien JOANNIEZ et Daniela TIENI/ Rouergue

Les illustrations de Daniela TIENI apportent un plus au texte. Les couleurs noir, crème et rose offrent aux paysages intérieurs une douceur mais aussi une aridité. C'est encore de la solitude.
J'aime particulièrement ce partage entre la mère aveugle et son fils, plus qu'un jeu pour être les yeux de sa mère, cette dernière lui offre une porte ouverte de communication.

Un petit bijou donc!

La dernière année

© Thierry LENAIN et Benoit MOREL/ Oskar

"La dernière année ou pourquoi et comment le Père Noël décida d'arrêter - et pourquoi il ne recommença jamais" de Thierry LENAIN et illustré par Benoit MOREL est là aussi une pépite. A croire que cette maison d'édition, Oskar, et cet auteur, Thierry LENAIN, sont porteurs de sens.

© Thierry LENAIN et Benoit MOREL/ Oskar

Ce livre n'est pas à mettre entre toutes les mains (mais non, mais non): il vous faut ne plus croire au Père Noël ou croire en un certain réalisme de la chose, il vous faut aussi un esprit critique... Mais aussi il vous faut de la poésie dans l'acte de don. Vous avez tout cela, vous êtes déjà plus vieux qu'un jeune bambin, alors courrez le lire!

Rayer le nom des enfants qui ne croient plus en lui... inscrire les nouveaux rêveurs. Une petite pièce s'est cassée ce soir-là.
La désillusion le prend. Pourquoi donc autant d'enfants qu'il délaisse, ceux qui ne croient plus en lui, ceux que la poste a décidé de laisser de côté. Parce que oui, le Père Noël ne décide pas de ses déplacements.

Jusqu'à ce soir, il a préféré regarder le beau côté de sa charge. Mais ces jours-ci tout le reprend et il ne sait plus faire avec: cette multitude de faux pères-noëls qui font peur aux plus petits et rire les plus grands. Ces faux qui s'étalent devant les vitrines quand lui reste caché.
Les jouets choisis par des enfants conditionnés. Son rôle qui ne devient que de la distribution et plus ni de la correspondance, ni de la fabrication.
C'est cet acte de conscience qui le prend cette année là... la dernière. Il ouvre son esprit à un autre partage.

Ce livre est magnifique, pour parler du don, des cadeaux, de l'industrialisation des désirs... de l'acte de partage et de présence...

© Thierry LENAIN et Benoit MOREL/ Oskar

C'est chez elle que je l'avais vu... Gaëlle, chez cette autre, Clarabel, qu'il m'avait déjà parlé avant d'être lu et là qu'on en parle bien.