mardi 31 mars 2015

Un beau voyage dans le dix mille milliardième monde - NonNonBâ

(Attention au sens de lecture, cases et bulles, cf au bas du billet)

©  Shigeru MIZUKI / Cornélius

"- Prends soin de ton chagrin, c'est un trésor... Chigusa-chan t'a donné un beau souvenir... L'école, tu sais... il suffit de travailler juste assez pour ne pas rater les examens. Mais ce qui compte vraiment, c'est d'accumuler les trésors de l'instant qui passe... Un jour, ils te serviront..."
[...]

©  Shigeru MIZUKI / Cornélius

" Le corps grandit en mangeant... Mais le cœur grandit grâce à toutes sortes d’âmes que tu gardes en toi. Depuis tout petit, tu touches et tu vois ce qui t'entoure... Même les pierres ont une âme, et même les insectes... C'est grâce à toutes ces âmes qui nourrissent ton cœur que tu es déjà devenu un grand garçon...
- ...
- Mais parfois, on rencontre une âme trop lourde dans son cœur.
- Comme maintenant...
- Et dans l'avenir, tu trouveras des âmes encore beaucoup plus lourdes...
- Plus lourdes ?!
- Mais ton cœur aussi grandira, pour pouvoir garder toutes ces âmes, et c'est comme ça que tu deviendras adulte."

(extraits de "NonNonBâ" de Shigeru MIZUKI, édition Cornélius, dont je parle là)

***



La tête dans les nuages

 *Gyo FUJIKAWA

... à regarder tout avec bonheur...

lundi 30 mars 2015

Les sauvages

Comme à chaque fois, Mélanie RUTTEN nous embarque avec sensibilité et tout n'est pas accessible de suite: il faut prendre le temps, relire, replonger dans l'image.

© Mélanie RUTTEN/ Memo

"Les sauvages", ce ne sont pas ces deux ombres qui sortent des maison cette nuit. Non, pas vraiment. Les deux silhouettes partent pour toujours, elles n'ont pas peur.

Elles savent qu'il faut partir, partir pour être libres, spontanées. L'aventure est là dans cette escapade dans le noir, entre les lianes mais tout de même protégés par les arbres. Il faut un effort. Elles arrivent sur l'île et se dévoilent: garçon, fille mais aussi amis imaginaires, les sauvages. Cette nuit, ils jouent, découvrent, imaginent, expérimentent. La joie est communicative. Ce sont des jeux, des partages, des soutiens.
"C'était une bande de sauvages et c'était leur clairière. Faite d'ombres et de lumière. Chacun y avait sa place. Ils construisaient une cabane, ils la décoraient, ils dormaient, ils mettaient de l'ordre e ils grandissaient. Le temps s'arrêtait.
Cette nuit, c'était toujours."
 Mais celui qui fait peur n'est pas loin. Une dispute et le voilà prêt à attaquer. 

© Mélanie RUTTEN/ Memo

Une île où les enfants sont eux-même sans observateur, sans adulte, sans règles, sans jugement. Dans un univers inventé, au plus près de leurs émotions, du merveilleux, de la vie. Il y a dans leur fuite, une envie d'enfantillages, de retour à la nature mais bien plus une envie de grandir mais pas à tous prix. C'est une ode à l'enfance, pour leur accorder du temps et de la confiance.

© Mélanie RUTTEN/ Memo
 
L'histoire est malicieuse, délicieuse et délicate. Mélanie RUTTEN nous offre avec son jeu de couleurs cette nature mystérieuse et fabuleuse. Des magnifiques fleurs et personnages minéral/végétal/animal. Des ombres complices, d'autres plus angoissantes.


mercredi 25 mars 2015

Thésée et le Minotaure

Encore une version me direz-vous! Oui, une autre mais une version presque plus adulte. (Et puis, entre nous soit dit, vous en trouverez encore et encore sur ce média!!)

© Pan BOUYOUCAS et Stéphane JORISCH/ Les 400 coups

"Thésée et le Minotaure" de Pan BOUYOUCAS et illustré par Stéphane JORISCH inclut le duel entre le héros et le monstre dans un contexte plus complet.
L'ambitieux roi de Crête, Minos, souhaite conquérir les mers mais n'est pas suivi de son peuple. Il demande l'aide de Poséidon pour convaincre. Le dieu lui offre un magnifique taureau blanc à sacrifier. Mais Minos est orgueilleux et provoque la fureur du dieu de la mer. Astérion naît. Fils de sa femme, ce bébé a la tête d'un taureau.

© Pan BOUYOUCAS et Stéphane JORISCH/ Les 400 coups

Minos l'enferme et va lui fournir de quoi vivre. Le Minotaure est dans sa prison, le labyrinthe, et attend la chair humaine. Le roi d'Athènes, Égée, est vieux et plus intéressé par l'éducation de son peuple et le partage culturel. Minos en profite et lui ordonne 14 jeunes gens. Mais Thésée est là. Fils d’Égée élevé par sa mère, il est à la recherche de son père, cet inconnu. A son double apprentissage, physique et intellectuel, il ajoutera un courage et une férocité avant d'arriver à la cour de son père.
Thésée embarque pour tuer le Minotaure, averti par Dédale. Il sera aidée par Ariane, la fille du roi Minos.
Le récit va jusqu'aux remords de Thésée.

© Pan BOUYOUCAS et Stéphane JORISCH/ Les 400 coups

Le propos amène les parts d'ombre de l'homme, orgueil, férocité, désespoir, animalité. L'ambiguïté est partout, le malaise aussi. Médée l’empoisonneuse, Ariane amante, Thésée brutal, le Minotaure effroyable et censé.

© Pan BOUYOUCAS et Stéphane JORISCH/ Les 400 coups

Le texte est servi par les illustrations de Stéphane JORISCH extrêmement modelées. Les corps sont anguleux, sensuels, en mouvement, dénudés sans outrance. Les visages sont émaciés, expressifs et quelque fois avec un soupçon de surréalisme... ce Minotaure de couverture! Les couleurs sont comme passées et avec l'encre et le crayon, nous aurions presque l'impression d'avoir des fresques un peu défraichies.
Le livre est presque trop court: cet album avec du texte aurait mérité d'être un court roman illustré.


mardi 24 mars 2015

Féroce

Les loups sont depuis longtemps des présences dans ma vie. Des angoisses peut-être au début mais très vite des compagnons, des sauvages qu'il est difficile d'amadouer, des bêtes fières et sans regret. J'ai même eu la chance d'en côtoyer un, légèrement domestiqué.
J'ai un lien aussi avec les bouleaux. Bien-sûr moins passionnant, quoique. Mes premières siestes de bébé, de tout petit enfant. J'aime l'écorce qui se déchire, se délite mais ne saigne pas. J'aime les tons noir et blanc que l'argent et l'or des feuilles révèlent.
Alors un loup dans une forêt de bouleaux était un thème à ne pas laisser de côté.

© Jean-François CHABAS et David SALA/ Casterman

"Féroce" de Jean-François CHABAS et illustré par David SALA est un bel objet aux rabats immenses, aux reflets gaufrés et aux magnifiques illustrations.

© Jean-François CHABAS et David SALA/ Casterman

"Quand Fenris naquit, il n'était, comme tous les louveteaux, qu'une petite boule de poils gluante, que sa mère lécha afin de la nettoyer. Mais dès qu'il écarquilla les yeux et ouvrit la bouche pour bâiller, il eut l'air tout à fait sanguinaire, épouvantable et cruel. C'était certes une qualité indéniable pour un loup, mais point trop n'en faut: ses frères eux-même furent effrayés."

© Jean-François CHABAS et David SALA/ Casterman

Fenris grandit mais toujours avec sa gueule si impressionnante qu'il fait peur. A force d'effrayer sans rien faire, à force d'être seul, il le devient, c'est si simple. Féroce dans cette forêt. Féroce au point d'être annoncé partout où il passe. "Plus il était redouté, plus sa cruauté augmentait ; la solitude aggravant les choses, le loup rouge devint légendaire. Il était désormais Fenris le Féroce. Celui qui faisait se coucher les fleurs, et ployer les herbes des champs."

Mais qu'est-ce donc? Une fillette perdue? Que fait-elle là toute seule dans la forêt? Elle ne sait pas encore à qui elle a affaire. Il va lui montrer. Elle sera gober toute crue ou au mieux déguerpira devant tant de férocité.
"On ne l'avait pas touché depuis des années.
 - Ah ! on est timide ! dit la petite fille. On s'effarouche facilement ! Remarquez que je ne vous jette pas la pierre. Il m'a souvent été répété, à moi-même, de ne pas adresser la parole aux étrangers. Vous avez des parents autoritaires ?"

© Jean-François CHABAS et David SALA/ Casterman

Ce loup mis de côté, réduit à son apparence, à qui on ne laisse aucune chance, devient lui-même ce que l'on attend de lui. Dans cet album, c'est le devenir de chacun qui est en jeu, le choix d'être ce que nous souhaitons.
Il y a aussi cette référence au chaperon rouge... face, cette fois, au loup rouge. Un loup qui fait peur ou une enfant qui fait peur.
C'est une histoire d'amitié, de partage, de choix de vie.

© Jean-François CHABAS et David SALA/ Casterman

Mécène

... si, si, un peu. Je n'ai pas eu besoin d'aller au salon du livre pour faire une razzia ces deux derniers mois. Bah oui, je ne fais pas la photo tout le temps, je déprimerais sur l'ampleur du budget loisir, évasion, culture, développement, bonheur, partage, transmission, bulle d'air, d'esprit, d'humour et de vie!


Beaucoup de jeunesse, comme d'habitude, pour les romans adulte j'ai une amie qui me pourvoie en prêt avec bonheur, intertextualité choisie, voulue, approuvée et revendiquée.
Je suis toujours avec émotion la très fine Mélanie RUTTEN. Je complète nos feuilletons de mythologie grecque. Je comble les manques des Calvin et Hobbes. Je continue les théories sur la méditations... entre autre

Lili Goth et la souris fantôme

© Chris RIDDEL/ Milan jeunesse

Pour Halloween (oui, oui, nous en sommes loin) ou pour un petit frisson dans le dos, "Lili Goth et la souris fantôme" de Chris RIDDEL est à dévorer.
Lili vit avec son père Lord Goth dans le Manoir des frissons frissonnants. Sa mère est morte il y a quelques années et elle vit "presque" seule dans cette grande demeure. Tellement ressemblante à sa mère que son père la met de côté et ne la voit que le mercredi pour le thé.


© Chris RIDDEL/ Milan jeunesse
Ce soir, une souris apparait au pied du lit en baldaquin. Un fantôme de souris. Dans quelques jours ont lieu la course de chevaux de bois et la chasse à l'intérieur organisées par son père. Mais cette fois-ci il se passe quelque chose.
Lili va rencontrer d'autres enfants aux réunions du grenier et aussi découvrir des monstres. Sirène, harpie, vampire, faune.

© Chris RIDDEL/ Milan jeunesse

Nous pouvons compter sur Chris RIDDEL pour nous emmener dans des univers fabuleux où se joignent le fantastique et l'humour. Les détails sont rocambolesques comme les portraits tableaux de famille, les costumes, les plans et les lieux mystérieux.
C'est une belle petite histoire pour les jeunes lecteurs, avec un peu de frousse à la clef!

Un autre avis bien plus argumenté, celui de Lily (avec un Y cette fois), merci!

lundi 23 mars 2015

La fille maudite du Capitaine Pirate

Qu'il est tentant de mettre dans son cabas le premier volume de cette bande dessinée. Sa couverture est magnifique avec son crâne, ses chardons et la belle image de cette enfant au bandeau.

© Jeremy A.BASTIAN/ La cerise

"La fille maudite du Capitaine Pirate" de Jeremy A.BASTIAN nous amène en Jamaïque en l'an 1728. Une gamine vit sur la plage et rencontre par hasard la fille du gouverneur. Demain, elle sera partie à la recherche de son père, un capitaine pirate et invite cette dernière à se joindre à elle, mais la jeune pirate partira en fait seule. Le problème est qu'elle ne sait pas qui est son père. Ils sont encore 5 capitaines à naviguer dans les mers d'Omerta.

© Jeremy A.BASTIAN/ La cerise

Avec son ami le perroquet, Poivre d'As, elle va découvrir la mer et même sous la mer. Deux compagnons en armure, espadons de métal mais presque un peu Don Quichotte, les accompagneront. Mais la fille maudite du Capitaine Pirate n'a pas peur.

© Jeremy A.BASTIAN/ La cerise

Le récit est un peu plat mais les rencontres visuelles sont, elles, stupéfiantes et méritent le détour. Cela fourmille de détails, de personnages secondaires représentés aussi bien que les principaux. Le tout est fantastique, cruel, baroque et jouissif.

© Jeremy A.BASTIAN/ La cerise

On y retrouve des dessins style gravure fouillées et faite à taille réelle, des inspirations de Gustave DORE ou de Henry HOLIDAY mais aussi un peu des personnages déformés, un Humpty Dumpty de Lewis CARROLL.

© Jeremy A.BASTIAN/ La cerise

Un avis mitigé là et un interview.

La grande aventure de l'évolution, Une histoire d'aujourd'hui

La collection "Les Encyclopédies" de Milan offre des documentaires très complets. "Les religions" m'avait emballée. Avec "La grande aventure de l'évolution" de Jean-Baptiste De PANAFIEU et illustré par Jean-Pierre JOBLIN, le sujet de l'évolution est rajeuni.

© Jean-Baptiste De PANAFIEU et Jean-Pierre JOBLIN/ Milan jeunesse
* non, mais de quoi je me mêle petit chat!

Oui il est question de Darwin et de la naissance de la vie sur terre, des ancêtres de l'homme. Mais le parti-pris est aussi de nous montrer des exemples contemporains des éléments de l'évolution. En cela, le documentaire est très très bien fait.
Treize chapitres emmènent sans prétention le lecteur dans des notions de biologie comme la mutation, l'évolution, les familles et espèces, selon le milieu, l'isolation, les interactions et les ancêtres. 

© Jean-Baptiste De PANAFIEU et Jean-Pierre JOBLIN/ Milan jeunesse

Seront présentés les restes de l'évolution humaine (par exemple sa pilosité à chair de poule), les mutations (transformations d'une générations à l'autre), toutes les voies de l'évolution animale ou végétale, les familles et aussi une idée d'évolution permanente.
L'importance des interactions entre prédateurs et proies, parasites et hôtes, alliés aussi (comme les ciliés, bactéries favorables à la digestion des ruminants ou les pollinisateurs pour les végétaux).
Les multiples chemins de l'évolution pour un comportement final similaire (nage grâce aux nageoires ou propulseurs) ou ustensiles à venins par une évolution d'organes différents (aiguillon des abeilles de l'organe de ponte, dents des serpents des organes salivaires, ergots de l’ornithorynque des glandes sudoripares).
Des poches de marsupiaux ou des dents de sabre même à d'autres que les tigres.

© Jean-Baptiste De PANAFIEU et Jean-Pierre JOBLIN/ Milan jeunesse

Un parallèle possible entre le dauphin et le requin, un aileron cartilagineux contre un repli de peau mais encore :
"L'adaptation au milieu marin a abouti à des résultats similaires par des voies distinctes. Ce mécanisme est appelé "convergence" par les biologistes. En effet, les espèces ont convergé vers une même forme à partir d'ancêtres différents: des poissons pour les requins, des mammifères quadrupèdes terrestres pour les dauphins et de gros reptiles terrestres pour les ichtyosaures."
Des traces presque disparues, comme les pattes des serpents, les yeux sur la face supérieure de certains poissons comme la limande, la plie, le nombre de pattes, d'ailes ou de vertèbres).
Des outils multifonctions comme les nageoires, les ailes et l'importance de la kératine ou de la chitine.
Sans oublier la part de sélection naturelle ou artificielle (reproduction, camouflage, danger ou résistance, domestication).

© Jean-Baptiste De PANAFIEU et Jean-Pierre JOBLIN/ Milan jeunesse

Les chapitres sont très illustrés avec quelques fois des schémas explicatifs et proposent des cas par cas très explicites pour chaque indication. C'est complet, ludique et prouve que le sujet est immense.


mercredi 18 mars 2015

J'ai un pouvoir terrifiant sur mon frère - L'ascension du Haut Mal


"J'observe bien les crises de mon frère et un jour je me lance dans un jeu terrible.
[...]
Soudain, j'ai peur de ce que je suis en train de faire. J'ai un pouvoir terrifiant sur mon frère, j'en prends conscience. Je ne recommencerai jamais ce jeu. J'ai le sentiment d'avoir grandi."

(extrait de "L'ascension du Haut Mal", tome 1, de David B., L'association)

lundi 16 mars 2015

Jason et la Toison d'or

Nous dénichons, où que nous soyons, tous les albums ou bandes dessinées sur le sujet. Mais la mythologie grecque gardera toujours certains de ses secrets.
En finissant "Le feuilleton d'Hermès" de Murielle SZAC, nous redécouvrons Jason, nous avions encore envie d'une autre version, pour tourner autour de cette aventure. Christine PALLUY a écrit ou adapté deux livres sur Jason. Nous profitons de l'un des deux depuis quelques temps déjà. "Jason et la Toison d'or" illustré par Giorgio BARONI est arrivé avec envie dans les lectures du soir

© Christine PALLUY et Giorgio BARONI/ Milan jeunesse

Ce présent album reprend en effet toute l'aventure de Jason et en particulier les obstacles rencontrés en cours de navigation, ce que laissait de côté l'album court que l'auteure propose aux plus jeunes lecteurs (voir lien au dessus). Les argonautes sont présentés et nous suivons leurs déboires. L'île de Lemnos et ses femmes, l'île de Cyzique et ses géants mais aussi le sort funeste des nouveaux amis de Jason et sa troupe. Hylas capturé, le combat contre le roi de Bébryces, Phinée et les harpies, les roches bleues.

© Christine PALLUY et Giorgio BARONI/ Milan jeunesse

Les dernières étapes en Colchide, la confrontation avec les taureaux cracheurs de feu, les dents du dragon ou le serpent ne semblent presque que des détails.
Les affronts faits aux dieux amènent le récit. Héra mais aussi Athéna ou Aphrodite aident les argonautes. Une autre femme prend ici une place de choix, Médée la princesse, la magicienne, celle qui donnera les solutions pour acquérir la Toison d'or mais aussi déjouer le géant de fer Thalos. Femme éprise, amoureuse, trahie, dangereuse.

© Christine PALLUY et Giorgio BARONI/ Milan jeunesse

L'album donne des pistes de compréhension et donne envie d'en savoir encore plus. Les illustrations de Giorgio BARONI offrent des illustrations aux flous choisis. C'est brumeux, ouaté tout en proposant quelques chocs. Elles ressemblent plus à des peintures en clair obscur.


Alice aux pays des merveilles

*source Rébecca DAUTREMER

Oui, je n'ai pas pu résister: "Alice aux pays des merveilles" de Lewis CARROLL est sorti en format presque poche, à prix mini... Quel sourire, Monsieur chat du Cheshire!

mercredi 11 mars 2015

Le coffre enchanté


Une illustration de ce petit conte pour les plus jeunes lecteurs. "Le coffre enchanté" de Jean-François CHABAS et illustré par David SALA est une mise en bouche.
Un coffre merveilleux, sublime, que personne ne peut ouvrir. Un coffre offert (à contre-cœur souvent) à l'Empereur. Mais qu'il y a-t-il dedans? Tous sont appelés à la cour pour l'ouvrir... ici le serrurier vient tenter sa chance...
David SALA proposait déjà ses reflets, ses éclats, ses touches de lumières. C'est beau (inspiration Gustav KLIMT et peut-être Kay NIELSEN pour le chevalier de la couverture) mais depuis, l'illustrateur a poussé son style encore plus loin sur les autres albums faits avec son compère auteur, "Le bonheur prisonnier" ou "La colère de Banshee" (et le texte est lui aussi plus dense).

lundi 9 mars 2015

Un pas à la fois

En ouvrant le dernier album illustré par Joanna CONCEJO, j'avais envie de reprendre ces anciens, suivre aussi son fil poétique, surréaliste, déconcertant souvent.

© Nicole Blanche MEZZADONNA et Joanna CONCEJO/ Notari

Dans "Un pas à la fois" de Nicole Blanche MEZZADONNA, l'illustratrice offre ainsi une seconde lecture, quadrillée, raisonnée, comptable mais aussi pleine d'une poésie auquel le personnage ne succombe pas encore.
Julot vit dans l'appartement de sa tante décédée. Il compte bien suivre ses directives même après sa mort. Toute sa vie est réglée. Entre tocs mais aussi raisonnements sur la meilleure utilisation du cerveau, du corps, l'optimisation des déplacements, l'homme à la tête de chien se réveille et suit son quotidien agencé au pas près.

© Nicole Blanche MEZZADONNA et Joanna CONCEJO/ Notari

Ses choix sont définis par d'autres, le chien de sa sœur validant l’habillement, la tante la permanence d'un habitat sans modification possible, la mère sa manière d'être poli et réservé ou encore sa nièce amenant les rapports familiaux.
La volonté de Julot semble choisir le développement personnel à chaque instant mais sans joie, sans saveur. Il y a bien ses oiseaux, sur le tapis, dans les illustrations de Joanna CONCEJO, le vélo ou ce petit jouet tricoté. Un jour, une maille se défait et c'est le début du changement.

© Nicole Blanche MEZZADONNA et Joanna CONCEJO/ Notari

Nicole Blanche MEZZADONNA offre là un album aux nombreuses lectures. Les plus jeunes lecteurs seront peut-être un peu déboussolés par cet homme chien et son comportement. Mais au fur et à mesure, ce sont de nombreux points de vue philosophiques et psychologiques qui prennent sens. Une rigidité de la vie se délite peu à peu. Même peut-être une forme de handicap, au moins une autre façon d'être au monde.
Joanna CONCEJO a ainsi tout le loisir d'offrir à son personnage des imageries pleines de détails, de quadrillage, de méticulosité feuillue. Ces feuilles de ficus qui prennent tant de place dans les appartements, qu'il faut mettre dans les escaliers, partie commune de l'immeuble, et qu'il faut hypnotiser pour les tailler.


samedi 7 mars 2015

Alpha... directions

Un indispensable!
J'en ai parlé ailleurs, avant même de le posséder. J'en ai parlé sans en dire un mot, juste pour le plaisir de l'ouvrir, de le feuilleter et de décalquer. Je n'en ai pas parlé parce qu'il y aurait tellement de choses à en dire. Et puis je l'ai laissé de côté. Juste à côté, sur ma table de chevet (enfin ils sont nombreux à cet endroit).
Cela devait être une trilogie (avant l'homme, l'homme et le futur), ce sera un tétralogie, l'auteur n'ayant pas réussi à condenser l'hominidé en un seul tome. Grand bien lui fasse! "Alpha... directions" de Jens HARDER est le premier tome.

© Jens HARDER/ l'an 2 / Actes Sud

Ce n'est pas la première fois que la naissance de l'univers ou de la vie est le thème d'un livre. C'est un peu plus rare en ce qui concerne une bande dessinée. Ce serait pourtant simpliste de limiter celle-ci, de plus de 300 pages, juste à une histoire de la création du monde. Il s'agit plutôt d'une version mêlant toutes les autres. Une encyclopédie iconographique de toutes les conceptions de la genèse du monde.
Le parti-pris est scientifique, le créationnisme religieux est mis de côté. Se suivent les différentes étapes de la matière, des particules, de la vie. Pourtant à ce propos très rationnel s'apposent toutes les autres approches, les dernières découvertes scientifiques se présentent en même temps que la présentation biblique ou que les cosmogonies de différentes cultures: indienne, inuit, égyptienne, mésopotamienne, aztèque etc...

© Jens HARDER/ l'an 2 / Actes Sud

Les magnifiques illustrations décrivent les temps géologiques accompagnées de peu de textes. Nous pourrions croire que la vie arrive vite dans le livre avec bien-sûr ces dinosaures qui nous plaisent tant. Et bien, le soleil n'arrive qu'en page 59, la vie en page 135 et les dinosaures page 250. Autant vous dire que le fourmillement de bactéries, de flux, de forces en puissance, de végétaux, d'algues, d’arthropodes est impressionnant. Vous découvrirez bien-sûr les étapes importantes, l'ozone, le premier cordé (l'architecture osseuse comme le squelette métallique d'un pont), l’œuf, les ailes etc...

Des dessins des manifestations physiques, chimiques, vivantes, astronomiques, géologiques,... côtoient des dessins de lieux symboliques (pour la science mais aussi manifestations géologiques, architectures, ruines antiques), des fenêtres sur les scientifiques ou leurs instruments (pendule de Foucault, boite de pétris, laboratoires, navette spatiale ou télescope...), des encarts sur d'autres vues éclairantes (un rubiscube, une étude de coquillage et du chiffre de Fibonacci). Par exemple pour expliquer des concepts, l'auteur propose des associations visuelles: l'attraction du soleil, un aimant, une boule de neige amalgamant la neige autour et grandissant, pour la gravité la pomme, pour la mise en place de l'univers, la dernière pièce d'un puzzle, une partie de billard.
Jens HARDER propose aussi des thématiques plus poussés par exemple l'apparition de la reproduction, vie et mort, avec une image d'Adam et Eve, de la faucheuse, de spermatozoïde mais aussi des amants de Pompéi, une image soft du kama-sutra ou de la reproduction animale.

© Jens HARDER/ l'an 2 / Actes Sud

Ce livre est un summum. Vous pouvez l'ouvrir à n'importe quelle page et profiter du spectacle. Ne prendre qu'une période, au chapitrage coloré. Ou vous offrir la lecture de ce "roman" graphique. Peu de texte, oui, mais tellement de dialogues entre l'histoire des sciences, les péripéties du big bang à l'humain et la culture.
Le propos est ainsi un va et vient entre une description chronologique et des focus culturels.
Après une petite déstabilisation dûe au foisonnement d'illustrations ultra-réalistes face à des anachronismes pour nous présenter comment nous en sommes conscients, des explicitations scientifiques et des iconographies très fantaisistes, vous serez émerveillé par le voyage plein d'humour.

© Jens HARDER/ l'an 2 / Actes Sud

Des peintures de Bosch, de Goya, de Michel-Ange, Magritte, Hokusai. Des bestiaires du monde entier, moyenâgeux, grecque avec la chimère, japonais avec le kappa. Mais aussi d'autres références, Mélies, mythologie grecque, mais aussi d'autres pour les plus jeunes "Gon" le petit dinosaure, Tintin, Donald Duck, "Les dents de la mer", "Mille et une pattes".

Je vous l'avais dit, tant à dire. Alors plongez dans ces pages en bichromie...


Jens Harder - Alpha (directions) par lafamilledigitale

mercredi 4 mars 2015

Equilibre - Lettres de l'écureuil à la fourmi

Il n'y a pas à dire: certains livres reviennent avec fréquence dans les lectures du soir. Il n'y a pas à dire mais certains auteurs ont une douceur, une tendresse que nous aimons retrouver encore et encore. Il n'y a pas à dire mais certaines rencontres, qu'ils nous proposent, restent en mémoire.


Un échange entre l'éléphant et l'escargot:
"
Bien cher escargot,
Puis-je vous demander de m'accorder une danse, pas n'importe où, sur votre maisonnette? Rien que quelques pas? C'est mon vœu le plus cher. Je danserai très délicatement, pour que nous ne transpercions pas votre toit. Je le promets. Pour autant, bien sûr, que l'on puisse promettre une telle chose.
L'éléphant

Bien cher éléphant,
Merci pour votre lettre. Plus tard, je vous accorderai bien volontiers une danse sur ma coquille. Cela ne fait presque aucun doute. Je trouve que je danse très bien. Mais en ce moment, hélas, cela ne m'arrange pas vraiment.
L'escargot
"
(extrait de "Lettres de l'écureuil à la fourmi" de Toon TELLEGEN, Albin Michel jeunesse; source sculpture de Miquel BRACELO)

Nous aimons suivre cet éléphant pataud qui ne souhaite que trouver l'équilibre en hauteur, défier la pesanteur.
Une certaine option serait l'escargot et la tortue de Bernard FRIOT...

mardi 3 mars 2015

Le bord du monde

Il s'agit d'un livre que nous avons dans la bibliothèque depuis bien longtemps, nous piochons à loisir et pourtant je ne vous en parle pas... mince alors: vous ne pouvez pas vous ruer dessus.

  © Shel SILVERSTEIN/ Editions Mémo

"Le bord du monde" poèmes et dessins de Shel SILVERSTEIN est une pépite. Il s'agit de prose, ou non, armé de beaucoup d'humour, d'absurde et de surréalisme américain. Vous êtes bercés aussi par les dessins de l'auteur, un peu noirs et bizarres.
Il vous faudra du souffle, des relectures immédiates, pour offrir à voix haute, avec le timing adéquat l'une des petites histoires. Elles sont courtes, voire extra-courtes, mais rythmées à souhait. C'est évident, l'homme est auteur, compositeur, chanteur. Cela sonne.
C'est sûr il faudra aussi vous faire au phrasé, un peu alambiqué, quelque fois déroutant. Bah oui, il a bien fallu traduire le gars et Françoise MORVAN a dû s'arracher les cheveux quelque fois.

 © Shel SILVERSTEIN/ Editions Mémo

Alors oui, nous l'ouvrons souvent, pour un, deux ou trois poèmes. Nous suivons des pirates Cap'taines, des ogres, des brontosaures Isidor qui, après l'apparition de brontosaurounets, deviendraient Ginette. Des animaux normaux deviennent au hasard d'une histoire savoureux, un hippopotame, des rats contre des chats, un lion qui écrit (Ah bah non, c'est pas lui!),

"Instructions:

Si vous voulez envers et contre tout
Donner un bain à un petit tatou,
Il vous faudra un pain de savon noir,
Un paquet bien tassé de bon espoir
Et soixante-dix-huit gratounettatous."

Vous aurez des barbes, des chapeaux, des maisons hantées. Des trucs pas tout à fait normaux, oui un chien à deux queues, un étourdi assis sur sa tête, une ombre lavée.

Alors je pourrais vous en dire plus mais il nous faut du temps pour savoureux ce livre bien épais, 170 pages environ. Alors qu'une possibilité, faire comme nous, l'ouvrir, siroter un verre de lait de fraise et lire en rigolant, en relisant pour tout comprendre aussi, et relire encore pour y mettre le peps... et appuyer encore la chute de toutes les histoires...

 © Shel SILVERSTEIN/ Editions Mémo

"Le chien à deux queues:

[...]
Il ne mord pas, ne grogne pas et jamais n'aboie.
Grattouillez-lui les queues, ça y est, il est en joie.
Il vous faudra sortir l'animal
Deux fois plus qu'un toutou genre banal,
Mais ça, ça va de soi, vous devinez pourquoi."

Pour l'instant nos préférés sont "La p'tite loco bleue" essoufflée à souhait, je vous la ferais peut-être un jour en document audio (la voici), "Boa constrictor", "Le crocodile a mal aux dents", "Avertissement" pour les doigts dans le nez. Mais vous en trouverez tellement d'autres.

Voici "Avertissement" en version originale, voix de l'auteur, extrait du livre audio "Where the Sidewalk Ends":



Et puis un jour je vous parlerais d'un lion chasseur, encore une histoire loufoque.

* appareil photo en réparation d'où ces images avec version originale.

Mindfulness: La pleine conscience pour les adolescents

Sur ce média vous ne le savez peut-être pas mais j'aime beaucoup la méditation dans ce qu'elle offre de perspectives sur notre sérénité. J'achète tous les livres qui pourraient donner la voix la plus simple pour les plus jeunes alors oui je me suis ruée sur cette proposition, surtout que, chouette, il s'agit là de pratique.


"Mindfulness: La pleine conscience pour les adolescents, exercices" de David DEWULF est un livret CD qui accompagne un ouvrage plus complet sur le sujet. Nous pourrons en effet reprocher à ce petit livre de ne pas aller au bout de toutes les explicitations mais ce n'est pas son objectif. Ici le texte offre une première approche de ce que les méditations peuvent apporter mais le principal reste dans l'écoute du CD.
Destiné aux adolescents, le tutoiement et certains termes de connivence apparaissent. Mais pourquoi pas! Il m'a fallu aussi passer par une réticence aux premières pistes du CD un peu moralisateur et plombant, ce sera difficile, "Rappelle-toi qu'il va falloir t'accrocher". Bon oui, la méditation est un acte à vivre, à péréniser, à pratiquer. C'est vrai aussi que pour les débutants ce n'est pas évident ce temps de lâcher prise des émotions, des pensées, de la respiration mais pourquoi accentuer le tout?

Les exercices suivent, sur la respiration (pour débutants) puis plus longue, le scan corporel comme un acte un peu facile et pourtant très salvateur pour ne plus avoir une idée de son corps mais le vivre. Des étirements de yoga sont proposés. Bonne ouverture aussi car il n'est pas question d'exigence-là mais justement d'exercices "en dessous de ses capacités" pour rester en contact avec les signaux des maux possibles.
Le lâcher prise des émotions, les astuces contre la rumination ou plutôt pour une rumination encadrée et de plus en plus légère et constructive. Des conseils pour les moments difficiles ou une ouverture sur le Hearthfulness. Ce dernier chapitre, sur le pardon et l'empathie, sera peut-être le plus complexe, le plus spirituel mais les approches sont simples et courtes.

Au final, ce livret CD est une belle première approche si l’adolescent est suivi dans la méditation, encouragé par un professionnel ou une collectivité. Sinon le résultat est un peu guindé et autoritaire à mon goût. A recommander en complément d'une autre approche de la méditation, avec un contact réel humain par exemple. A prendre aussi par pratiques individuelles: la méditation Montagne, du cinéma par exemple ou "madame ou monsieur commentaire".
David DEWULF est un médecin belge, fondateur de l'Institut pour l'Attention et la Pleine Conscience (I AM).

Merci aux éditions De Boeck et à l'opération Masse critique de Babelio.

lundi 2 mars 2015

Le Petit Chaperon rouge

Mais bien-sur tout le monde connait le petit Chaperon rouge. Cette enfant partie seule dans la forêt pour amener des victuailles à sa grand-mère là-bas. Oui, cette petite innocente rencontre le méchant loup qui ne pense qu'à la manger.
Oui tout le monde connait l'histoire, enfin d'histoire il y en a plusieurs. De quel conte parlons-nous? De celui de Charles PERRAULT ou de celui des frères GRIMM?

© Charles PERRAULT, Jacob et Wilhelm GRIMM, Joanna CONCEJO/ Notari

Ce "oui bien-sûr!" devient juste une accroche que l'album de Joanna CONCEJO défile encore. Elle fait le choix de séparer les deux versions, l'une après l'autre, et pourtant ses illustrations se font suite, continuent une même trame.
Charles PERRAULT offre la belle enfant à dévorer sans punir le loup. Les frères GRIMM, eux, emportent la petite et sa grand-mère mais les font revivre après engloutissement grâce au chasseur. Ces deux versions d'un conte oral présentent une petite fille, assez grande pour partir de l'autre côté du village, à travers les méandres d'une forêt immense, sombre et merveilleuse. L'enfant se dévoile presque grâce à son habit de femme, le chaperon: au masculin d'ailleurs, pas la petite chaperonne rouge. Rouge, véritable point de mire dans une forêt, véritable ligne directrice.

© Charles PERRAULT, Jacob et Wilhelm GRIMM, Joanna CONCEJO/ Notari

Joanna CONCEJO laisse parler les textes mais nous convie à bien plus que la moralité du danger. Un loup en veut à la vie de la mère-grand et de l'enfant. Mais la poésie des illustrations offre une toute autre lecture, ce jeu entre eux deux. Ils se cherchent, jouent à se faire peur un peu, beaucoup. Il y a comme une complicité, une initiation au danger. Le loup tire le fil rouge, le ruban des cheveux, la piste des empreintes, le sillage des odeurs et lie, délie, enroule et tire à nouveau.

© Charles PERRAULT, Jacob et Wilhelm GRIMM, Joanna CONCEJO/ Notari

En prenant le partie de la deuxième version, l'illustratrice apporte aussi une autre approche, celle de la vie, du chasseur sauveur mais aussi de ces femmes qui se sont fait flouées une fois et pas deux. Le chaperon rouge parle encore avec le loup mais l'attend avec astuce. La vieille femme et la jeune qui rentre dans l'âge adulte se partagent une sorte de féminité dégourdie.

© Charles PERRAULT, Jacob et Wilhelm GRIMM, Joanna CONCEJO/ Notari

Mais les illustrations sont encore plus troubles, avec grand délice. Nous sommes tour à tour, elle, l'enfant, puis nous sommes loup. Et puis ils sont plusieurs, toujours tapis dans la forêt. Et dire qu'elle en rêve aussi, qu'elle se joue aussi de lui...

Quel bonheur de redécouvrir ces contes dans les textes d'origine, après celle orale avec l'habit de fer blanc. Puis, quel plaisir de retrouver ce loup dangereux, cruel ou aguicheur, par exemple avec Fabrice GARNUNG ou encore un autre loup.